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Les racines de la guerre russo-ukrainienne

Vous pensez tout savoir de ce conflit parce que vous vous êtes tenu au courant en lisant tous les articles de presse et en suivant de près l’actualité sur les chaines d’information en continu? Oubliez tout ce que vous savez, parce que personne n’a jamais parlé de ce que je vais vous expliquer ici dans un média grand public.

La guerre russo-ukrainienne n’a pas commencé le 24 février 2022, pas plus qu’elle n’a commencé le 27 février 2014 quand des soldats sans insigne sont apparus un peu partout sur les points stratégiques en Crimée. Elle a commencé en 1996, alors que démarre le second mandat présidentiel de Bill Clinton.

Le contexte intellectuel des années 1990

Resituons un peu le contexte: l’URSS s’est effondrée en 1991, entrainant l’embrasement de tous les conflits ethniques que les soviétiques avaient gelé sous le rideau de fer. Yougoslavie, Caucase, pays d’Asie Centrale, tous s’embrasent dans des violences qui parfois virent à la guerre civile. La guerre serbo-croate, puis la Bosnie, ou encore la Tchétchénie et le Kosovo, marquent au fer rouge l’Histoire des années 1990. La Russie n’est plus que l’ombre d’elle-même et est dirigée par un alcoolique notoire, la Chine est toujours un pays du tiers monde, et l’Europe peine à se constituer. En clair: les Etats-Unis sont l’unique super-puissance qui domine le monde politiquement et économiquement.

Sous les deux mandats de Bill Clinton, les Etats-Unis se cherchent et n’ont pas envie d’assumer cette place de gendarme du monde que leur confère pourtant leur place mondiale. Il faut dire que le fiasco de l’opération américaine de maintien de la paix en Somalie (1993) a provoqué une crise majeure au sein du Pentagone et à la tête de l’Etat: alors même que le capitalisme est sorti vainqueur de la guerre froide contre le communisme, la Démocratie vient de se casser les dents sur un conflit ethnico-religieux.

Le 14 octobre 1993, un hélicoptère américain est abattu par les somaliens. Ce sera le symbole de l’intervention catastrophique des américains dans le pays.

Au sortir de la guerre froide, un regain d’intérêt pour les intellectuels est apparu. Il fallait des guides pour éclairer un nouveau chemin dans un monde encore incertain, et la Maison Blanche n’a pas hésité à faire appel à eux. En 1992, l’un des premiers « grands penseurs » de l’époque fait paraître un livre qui explique que l’Histoire, qui est une dialectique conflictuelle entre idéologies (une idée reprise de la philosophie hégélienne) est désormais arrêtée, la Démocratie a vaincu et domine désormais le monde: c’est La Fin de l’Histoire et le Dernier Homme, de Francis Fukuyama. Le succès retentissant de cette thèse et la controverse qui en a découlé lance la mode de ces penseurs à mi-chemin entre philosophie et politique. Un autre nom majeur est celui de Samuel Huntington, qui en 1996 fait paraître son fameux Choc des Civilisations, dans lequel il explique que la fin de l’URSS ramène la géopolitique à des conflits d’essence ethnico-religieuse, c’est à dire « civilisationnelle ». Il précise, à l’appui de sa démonstration, que les prémices de l’effondrement soviétique étaient lisibles dans les conflits opposant une composante de population musulmane à une autre populations non-musulmane (par exemple, le conflit entre Inde et Pakistan Oriental, devenu plus tard Bangladesh, ou encore le conflit Sri Lankais). C’est cette présentation de l’Islam comme générateur de conflits qui a brocardé Huntington au rang des idéologues controversés, voire racistes, même si ses analyses sont tout à fait neutres et pertinentes puisqu’il a anticipé de deux ans le conflit au Kosovo.

C’est dans cette effervescence que paraît en 1997 le livre d’un homme déjà bien connu des milieux politiques pour ses analyses à contre-courant: Le Grand Echiquier, de Zbigniew Brzezinski. Et vous allez maintenant mieux comprendre quel est le rapport avec le titre de cet article.

Le « grand échiquier », dans la vision de Brzezinski, c’est simplement la carte du monde, et les cases représentent les pays. Il commence par constater que désormais, l’essentiel du grand bloc continental eurasiatique est « vide », du fait de la chute de l’URSS. En face, les Etats-Unis sont en position de force, mais n’ont pas encore atteint la domination totale, parce qu’ils ne maitrisent pas le Heartland: ils ne contrôlent que la périphérie.

Arrêtons-nous quelques instants sur cette notion qui est indispensable pour comprendre la suite.

Le concept de « Heartland »

Le Heartland est un concept géographique apparu en 1904 dans un article intitulé « The Geographical Pivot of History » dans la revue « The Geographical Journal ». L’auteur, Halford MacKinder, y développe l’idée selon laquelle il existe dans le monde une région d’importance cruciale pour quiconque entend le dominer, du fait de sa localisation et de ses ressources: l’Asie Centrale, correspondant grosso modo aux pays allant du Caucase à la Sibérie et à l’Himalaya. Le contrôle de cette région est sensé assurer à l’empire qui la possède la domination sur le monde entier, car elle constitue le cœur géographique de celui-ci.

Le Heartland, tel qu’il apparaît dans l’article de MacKinder en 1904.

En 1997, quand Brzezinski publie son livre, il reprend ce concept presque tel quel, pour expliquer que si les Etats-Unis veulent réellement être la seule super-puissance au monde, il leur faut absolument dominer cette région. Seulement, il faut d’abord en déloger pour de bon l’influence russe, héritée de l’ère soviétique: tous les pays de cette zone étaient alors partie intégrante de l’URSS, à l’exception du Pakistan et de l’Afghanistan. C’est d’ailleurs parce que l’URSS n’a pas su prévaloir en Afghanistan que son empire s’est effondré. La thèse est évidemment critiquable et n’a pas manqué de l’être, mais l’idée est restée, encore jusqu’à nos jours, parce que les USA peuvent écrire leur récit national en expliquant que c’est leur intervention auprès des combattants afghans qu’ils ont pu résister aux soviétiques. Mais ceci est une autre histoire, liée à la création d’Al Qaeda et à cet élan à la CIA de création et de financement de rebelles dans des pays étrangers…

Bill Clinton tenant un discours en présence de Zbigniew Brzezinski, à gauche.

Brzezinski, comme d’ailleurs Huntington, dîne à la Maison Blanche en compagnie des Clinton et d’autres personnalités politiques ou militaires de l’époque, et il y expose sa vision, qui va fortement marquer la politique étrangère du Parti Démocrate, alors totalement déboussolé. Le Parti Républicain, lui, tient la sienne depuis le conflit koweito-irakien: pour dominer le monde, il faut dominer le pétrole.

L’idée séduit les officiels, et c’est ainsi que démarre l’un des plus grands encerclements politico-militaires de l’Histoire.

La mise en place du plan de conquête du Heartland

Bill Clinton n’a guère le temps de faire grand chose, hormis commencer à favoriser le Pakistan pour offrir aux USA un accès direct au heartland via l’océan indien. Sa politique est d’ailleurs empêtrée dans le scandale sexuel de l’affaire Monica Lewinski et l’impeachment qui en a découlé, auquel il n’a échappé que de peu. En 2000, il quitte la présidence et Georges W. Bush laisse de côté les plans démocrates pour continuer ceux laissés en suspens depuis la fin du conflit contre Saddam Hussein. Mais si la tête a changé, l’administration militaire, le renseignement et l’administration civile sont toujours les mêmes: c’est ce qu’on appelle « l’Etat Profond », ou « Deep State », comme l’a identifié en 1955 Hans Morgenhau. Les USA multiplient les bases militaires à l’étranger, continuent l’extension de l’OTAN vers les pays de l’Est de l’Europe, et bientôt commencent à œuvrer en Asie Centrale. L’Etat Profond parvient à convaincre Georges W. Bush de s’en prendre à l’Afghanistan, en plus de ses plans pour achever Saddam Hussein et son régime baasiste, lorsque surviennent les attentats du 11 septembre 2001 à New York. Le positionnement en Afghanistan correspond aux plans de destruction de l’Iran que Georges W. Bush a en tête. A ce moment-là, il s’agit de prendre en tenailles le dernier pays moyen-oriental qui résiste aux américains et qui menace Israel, ce qui est parfait aux yeux des « faucons » républicains.

Georges W. Bush lors de son discours sur « l’Axe du Mal », le 29 janvier 2002

C’est ainsi qu’en novembre 2001, débute la conquête de l’Afghanistan par les Etats-Unis, et qu’ainsi, les USA pénètrent véritablement dans le Heartland.

Ramzan Kadyrov et Vladimir Poutine, symboles du retour de la Russie parmi les grandes puissances mondiales

Cependant, un obstacle de taille se dresse toujours devant les Etats-Unis, et Brzezinski l’avait déjà parfaitement identifié: il s’agit de la Russie. Ce pays vient de se doter d’un nouveau président dont le discours et la poigne sont en passe d’inverser la tendance à la désagrégation de la Russie. Le Pentagone et la CIA observent avec intérêt puis angoisse le conflit qui se déclenche en Tchétchénie en août 1999. Alors encore premier ministre, Vladimir Poutine déclenche une vaste opération militaire contre la province séparatiste de Tchétchénie, suite à une série d’attentats meurtriers. Si le premier conflit entre décembre 1994 et août 1996 avait été catastrophique pour les troupes russes, le déploiement de forces et le niveau de violence de ce deuxième conflit permettent à la Russie de dominer les rebelles tchétchènes. En mai 2000, après seulement 9 mois de guerre, le contrôle russe sur la Tchétchénie est rétabli et les rebelles sont réduits à mener des opérations de guérilla limitées. Aux Etats-Unis, on comprend que le président Poutine vient de ramener la Russie sur les rails et que l’ère de la déliquescence est terminée.

Il est donc nécessaire d’abattre la Russie avant qu’elle ne rétablisse son contrôle sur le heartland.

Abattre la Russie passe par l’Ukraine

Brzezinski avait su pressentir que la Russie serait un adversaire des Etats-Unis pour le contrôle du Heartland. Il avait donc proposé un axe d’attaque contre elle, en identifiant l’Ukraine comme le grand point faible de la Russie renaissante.

L’Ukraine, explique-t-il, va devoir tôt ou tard choisir entre rester sous le contrôle russe, ou chercher une voie d’indépendance et s’engager vers la démocratie, et donc chercher à adhérer à l’OTAN ou à l’Union européenne. L’Ukraine peut se passer de la Russie, mais la Russie ne peut pas se passer de l’Ukraine. Pour Brzezinski, la réaction de la Russie à l’égard de l’émancipation de l’Ukraine vers l’Europe déterminera si les russes veulent devenir européens, ou s’ils souhaitent rester eurasiatiques et constituer une sorte de pays-continent isolé.

Viktor Iouchtchenko et Iulya Timochenko au moment de la Révolution Orange, en 2004

En 2004, l’Occident découvre avec stupeur qu’un candidat à la présidence ukrainienne, Viktor Iouchtchenko, a été empoisonné à la dioxine. Or, ce président est présenté comme étant « pro-occidental », face à son rival « pro-russe », Viktor Ianoukovytch. L’affaire prend des proportions telles que lorsque le résultat de l’élection présidentielle tombe, l’Ukraine entre dans une période de révolte qui sera appelée par la suite « la Révolution Orange ». Un second tour est réorganisé, et cette fois, c’est Iouchtchenko qui est élu président.

Il est très intéressant de noter ici la similarité entre la Révolution Orange et la Révolution des Roses qui a eu lieu en 2003 en Géorgie, dans des circonstances similaires, et qui verra l’accession au pouvoir du président Mikheil Saakachvili. Président qui d’ailleurs fuira son pays suite à des accusations de corruption et de détournement de fonds, et qui se rendra en Ukraine… où il deviendra député… avant de fuir à nouveau, mis en cause dans une affaire de corruption et de détournement de fonds!

La présidence Iouchtchenko ne se passe pas en douceur, et les affaires de corruption et de détournements de fonds se succèdent. Sa première ministre, Iulia Timochenko, égérie de la Révolution Orange, est une oligarque issue du milieu du pétrole. Ses liens avec les Etats-Unis sont très troubles, mais c’est surtout sa relation avec la Russie et principalement l’entreprise Gazprom qui la placent sur le grill. Il faut dire que ses agissements sont particulièrement troublants, et son implication dans le meurtre d’un député ukrainien au moment de la négociation de contrats très lucratifs sur la livraison de gaz à l’Ukraine apparaît comme très probable.

Hunter Biden, symbole de toutes les compromissions de la famille Biden en Ukraine, mais aussi en Chine…

Les crises se succèdent, et l’instabilité politique fait exploser l’animosité au niveau de la société civile. Dans ce climat très instable, les opportunités d’affaires très lucratives sont nombreuses mais risquées, et les enquêtes sont tout autant motivées par des raisons politiques que de véritables infractions pénales. Et c’est ainsi que le nom de Biden s’associe intrinsèquement au milieu des affaires ukrainiennes, lorsque Joe biden, alors vice-président de Barack Obama, se rend à Kiev. Son fils, dans la foulée, est nommé au conseil d’administration d’une société gazière, Burisma, avec de très juteuses opportunités affairistes à la limite de la légalité… Mais ceci est une toute autre histoire, qui dépasse largement du cadre de ce petit article sur les racines du conflit russo-ukrainien.

La suite, vous la connaissez tous, en principe: en novembre 2013, Viktor Ianoukovitch décide d’enterrer le projet d’accord avec l’Union Européenne, pour réengager le dialogue et la coopération avec Moscou. S’ensuivent alors des manifestations très violentes, au cours desquelles des dizaines de personnes, civils comme policiers, sont abattues dans des conditions mystérieuses et toujours non-élucidées. Ces événements mènent à la révolution de la place Maïdan, appelée « l’Euro-Maïdan », puis au coup d’Etat contre Viktor Ianoukovitch qui fuit le pays vers la Russie, et enfin l’annexion de la Crimée et la guerre civile dans le Donbass au cours de l’année 2014.

Manifestation pro-Européenne sur la place Maïdan, à Kiev

Le piège ukrainien

Le pourrissement de la situation en Ukraine a été voulu de bout en bout par les Etats-Unis. Le piège a été expliqué dans une publication de la RAND Corporation dès 2003 dans le rapport prospectif « NATO’s Eastern Agenda in a new strategic era », qui reprend comme par hasard la vision de Brzezinski sur l’Ukraine. Le rapport note qu’il n’y a aucun problème ethnique en Ukraine, où les habitants s’identifient d’ailleurs d’abord comme originaires de leur région, que comme ukrainiens. On y devine en filigrane que pour briser l’Ukraine, il faut jouer sur l’opposition entre la majorité « ukrainienne » et la minorité « russe », qui représente alors 8 millions de personnes sur une population de 47 millions. Une Ukraine fragmentée et instable n’est pas dans l’intérêt de la Russie, qui ne pourrait pas y intervenir militairement ni économiquement sans se mettre en danger.

Le rapport de la RAND Corporation identifiant l’Ukraine comme la faiblesse majeure de la Russie, avec la Géorgie et les pays Baltes.

On comprend entre les lignes que le plan pour l’Ukraine est simple: il faut d’abord la prendre au piège des relations vers l’ouest, en l’attirant avec des promesses de la part de l’Union européenne et de l’OTAN. Chose facile à l’époque, puisque l’Ukraine ambitionnait d’être un pont entre le monde occidental et la Russie, pour construire une prospérité durable. La position de l’Ukraine comme pont entre les deux mondes s’était d’ailleurs assise sur les gazoducs qui passaient sur son territoire, et généraient des revenus très conséquents.

En « décollant » l’Ukraine de la Russie, celle-ci allait perdre à la fois un de ses états satellites, mais elle allait en plus avoir à faire face à une menace stratégique, puisque l’OTAN serait littéralement à ses frontières, l’Ukraine n’étant plus un Etat tampon. La Russie devrait donc réagir politiquement, puis économiquement, et enfin militairement.

Or, au moment de l’élaboration de ce plan, la Russie était structurellement fragile, et n’aurait pu intervenir sans risquer de s’effondrer, comme l’URSS. Avec une Russie paralysée, voire empêtrée en Ukraine, il était ensuite facile de continuer le plan pour s’emparer du heartland au centre de l’Asie Centrale, voire in fine de démanteler la Russie en une multitude de petits Etats organisés autour des minorités ethniques les plus importantes en Russie: en divisant pour mieux régner, il aurait été plus simple de tenir sous emprise toute cette région.

L’aveuglement des élites US

Le problème de ce genre de plan, c’est qu’il ne peut pas se dérouler de façon rapide, et nécessite de s’inscrire dans le temps long, à l’échelle d’une génération au minimum. Et surtout, de réévaluer la pertinence du plan lui-même en fonction des évolutions au niveau mondial.

Les Etats-Unis n’ont pas su percevoir le changement de circonstances, ou du moins n’ont pas su en prendre toute la mesure. Pendant qu’ils étaient embourbés en Afghanistan et en Irak, un autre acteur étatique est parvenu au seuil de la super-puissance: la Chine.

Au cours des années 2000, la Chine est devenue littéralement l’atelier du monde, grâce à une politique de dumping économique très agressive qui a rendu toutes les industries occidentales totalement non-compétitives. L’Europe s’est engagée dans la voie de désindustrialisation et de délocalisation qui lui a coûté sa place de puissance économique dès la fin des années 1990, mais c’est surtout au cours des années 2000 que le mouvement s’est accéléré.

L’afflux de cash et de brevets techniques a transformé la Chine en moins d’une décennie, la sortant de son statut de pays du tiers-monde pour la faire devenir la deuxième puissance économique mondiale. Cette ascension a réveillé les appétits impériaux de la Chine, et surtout sa soif de ressources. Dès 2005, le livre blanc China’s Peaceful Development Road annonce les ambitions chinoises de co-développement avec les pays de l’ASEAN. Se réveillent également les tensions territoriales, en particulier sur le statut des îles disputées avec le Japon, les Philippines et bien sûr, Taïwan.

L’élan chinois atteint rapidement l’Afrique, et dès le début des années 2010, les journalistes commencent à parler de « Chinafrique », un terme calqué sur le concept de « Françafrique » pour désigner les relations d’influence française sur certains pays africains.

Xi Jinping au sommet du G20, en 2016

Puis en 2013, le président Xi Jinping lance officiellement l’un des plus grands projets de l’histoire chinoise moderne: les nouvelles routes de la soie. Baptisée « One Belt, One road Initiative », ce projet prévoit de développer les relations internationales avec un certain nombre de pays situés entre la Chine et l’Europe, via deux axes. Un premier, par voie maritime, est dirigé vers les pays tels que l’Indonésie, le Myanmar, le Sri Lanka, et s’oriente vers les pays du Moyen-Orient et d’Afrique, le second, par voie terrestre, s’oriente vers les pays… d’Asie Centrale.

Le partenariat sino-russe se renforce d’autant plus que l’Europe, les Etats-Unis et le Commonwealth britannique sont de moins en moins subtils dans leurs attaques contre le bloc qui se dessine et menace leurs projets d’hégémonie. Dans les faits, la Russie s’est repliée sur sa composante eurasiatique, et s’est ménagée un débouché vers la Chine et tout le sous-continent qui lui est lié, pour se préparer à une éventuelle confrontation politico-économique en Europe, suite à la crise qu’avait constitué la désormais oubliée crise du bouclier anti-missile américain qui devait être déployé en Pologne, en Roumanie et en Géorgie. Le conflit géorgien d’août 2008 a d’ailleurs constitué un électrochoc pour une partie du pouvoir russe, qui a compris qu’une confrontation avec l’Occident était inévitable. La Chine aussi l’a parfaitement compris, lorsque Barack Obama a annoncé le « grand pivot vers l’Asie » pour faire face à la montée chinoise, et soutenir ses satellites coréen et japonais. Une initiative aussitôt figée par la peur: le chercheur Graham Allison publie en 2012 un article dans le Financial Times, intitulé « Thucydides’s trap has been sprung in the Pacific », dans lequel il avertit que toutes les tentatives de confronter une puissance montante pour préserver l’hégémonie se sont soldées par une guerre désastreuse.

Conclusion

Toute la politique occidentale actuelle découle de cette période des années 1990 où les Etats-Unis se sont retrouvés sans adversaire. Pour maintenir leur privilèges, les dirigeants de l’Etat Profond ont créé des menaces, au premier rang desquels le terrorisme islamiste. En parallèle, la présidence démocrate s’est engagée dans un grand projet de géopolitique globale, en s’inspirant de la pensée de Zbigniew Brzezinski.

Ce projet, c’est la conquête du monde, qui commence par le contrôle du Heartland. Et pour conquérir le heartland, il faut amener la Russie à s’autodétruire dans une guerre en Ukraine.

Pourtant, cette théorie a été largement critiquée depuis sa formulation en 1904. D’une part, elle a inspiré l’idée du Lebensraum à Karl Haushofer, qui sera par la suite reprise par le National Socialisme et servira de justification à la Drang nach Osten, la « poussée vers l’Est » et l’opération Barbarossa. Une idée catastrophique pour le régime allemand et pour toutes l’Europe de l’est, jusqu’en Russie. D’autre part, parce qu’elle coïncide mal avec l’analyse « thalassocratique » d’Alfred Mahan, formulée dès 1899, qui démontre que la Puissance des grands Etats s’est toujours appuyé sur leur capacité à se projeter outre-mer pour aller rechercher des ressources, par le commerce ou la colonisation. Le fait est que 90% du commerce mondial passe par voie maritime, et que le contrôle des voies de navigation a conditionné l’essor et la chute des grands empires. Enfin, parce que contrairement à ce qu’affirme MacKinder, le contrôle de la région qu’il identifie comme étant le « heartland » n’a été déterminante qu’une seule fois dans l’histoire mondiale: lors des conquêtes mongoles de Gengis Khan. Encore que ce contrôle était parfaitement relatif et improductif, puisqu’il n’a pas été exploité et n’a jamais contrebalancé la puissance des centres les plus dynamiques du monde, qui se trouvaient alors en Europe occidentale et au Moyen-Orient.

Pour ces raisons, on le voit, le conflit ukrainien n’est pas près de s’arrêter. Il a été repoussé de 4 ans lors de l’élection surprise de Donald Trump en 2016, Hilarry Clinton ayant largement préparé la guerre lorsqu’elle était encore secrétaire d’Etat aux affaires étrangères sous Obama. Les Etats-Unis et l’Europe ont besoin de se convaincre que la Russie va s’effondrer à cause du conflit en Ukraine, pour pouvoir accéder au heartland sans aller à la guerre frontale. Mais c’est sans compter avec la Chine…

Le simple fait que l’Ukraine n’a jamais pu obtenir d’engagement sérieux pour son adhésion à l’OTAN ni à l’Union Européenne est la démonstration la plus éclatante qu’elle n’est qu’un pion sur le grand échiquier conçu par Brzezinski et sur lequel les démocrates ont décidé de placer leurs pions, parfois jusqu’à la corruption et les compromissions.

Reste à savoir désormais ce qui peut advenir de l’Occident si il échoue en Ukraine. L’arme économique des sanctions et du dollar sont devenus inefficaces, et sont même en train de se retourner contre les dirigeants et les peuples occidentaux.

L’Ukraine sera-t-il le tombeau de l’Empire américain?

De la différence entre légalité, démocratie et légitimité…

L’un des arguments qui m’agacent le plus en ce moment dans les pseudo-débats sur la réforme des retraites est celui selon lequel il faudrait arrêter de dire que le gouvernement est passé en force de façon non-démocratique, sous prétexte que la procédure du 49.3 est prévue dans la constitution et qu’il y a eu un « vote » avec la motion de censure…

Les tenants de cette ligne font semblant d’ignorer la différence entre Démocratie et Constitutionnalité, et semblent totalement ignares des questions sur la légalité, la représentativité et la légitimité. Accrochez-vous, ça va être un peu long, désolé, mais c’est comme ça.

En France, la Constitution indique que la Souveraineté est détenue par le Peuple, qui l’exerce à travers ses représentants, élus au suffrage universel.

Lorsque dans une élection, environ la majorité des électeurs décide de ne pas se déplacer aux urnes parce qu’aucun candidat n’est jugé digne de recevoir un vote, et que le candidat élu l’est avec entre la moitié et les deux tiers des votants, il est évident qu’on ne peut plus parler de représentativité de l’élu: la majorité de l’électorat n’a PAS voté pour lui.

L’Assemblée Nationale n’est PAS représentative du Peuple français.

L’Assemblée Nationale n’est pas le seul organe législatif: elle est doublée du Sénat, qui est formé par suffrage « universel indirect », c’est à dire que seuls les élus votent. Le Sénat ne représente que les élus eux-mêmes, et certainement pas le Peuple français. Or, il participe au processus législatif, peut amender des textes, peut en proposer, peut être à l’initiative de réformes, au même titre que l’Assemblée Nationale, sans pourtant être représentatif du Peuple français. Il n’a pas la même légitimité, il a pourtant quasiment les mêmes pouvoirs que l’Assemblée Nationale.

Puis vient le Gouvernement, dont le rôle constitutionnel est d’appliquer les lois: c’est le pouvoir exécutif. Le Gouvernement est sensé être au service de l’Assemblée Nationale et du Sénat, eux-mêmes sensés exprimer la volonté du Peuple français; indirectement le Gouvernement est sensé être au service du Peuple.

Or, le Gouvernement a pourtant l’initiative législative, détermine les ordres du jour des deux assemblées, et dispose de pouvoirs permettant de passer en force des réformes et des lois sans passer par la procédure législative habituelle: présentation du texte, discussions, amendements, débats sur les amendements, vote final. Le Gouvernement peut imposer d’interrompre la procédure à tout moment et de faire voter directement, en « engageant sa responsabilité ». Rappelons que le Gouvernement est normalement un organe exécutif, pas législatif. Les membres du Gouvernement ne sont pas élus, mais désignés par un premier ministre, lui-même non élu, mais désigné par le Président de la République. On a donc un organe qui n’est ni démocratiquement désigné, ni légitime par rapport à l’exercice de la souveraineté française (« représentants élus au suffrage universel », rappelez-vous), qui agit hors de son cadre constitutionnel originel fondé sur la séparation des Pouvoirs mais bénéficie de pouvoirs de contrôle sur les deux assemblées.

Prétendre que ce système serait démocratique alors que par essence il ne l’est pas puisqu’il est denature autocratique, c’est donc faire preuve d’une méconnaissance absolue des principes régissant le Droit Constitutionnel, qui ne se limite pas à la seule Ve République. « Pfff n’importe quoi » me répondront ces stupides amibes sans cervelle, aussi vais-je leur répondre tout de suite: mon petit gars, le Droit Constitutionnel, ça inclut aussi et entre autres le préambule de la Constitution de 1946 et la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, donc si tu sais pas ça, va te faire enculer.

L’âge du départ en retraite, jusqu’en 2008, était fixé par convention collective de branche, c’est à dire négociée par les représentants des travailleurs avec les représentants des employeurs, puis validée par le vote des travailleurs et des employeurs. Démocratie directe, autodétermination, souveraineté, tout était parfaitement respecté.

A partir de 2008, réforme Sarkozy qui fait basculer les conditions de départ à la retraite dans le Code de la Sécurité Sociale plutôt que dans le Code du Travail. Le Code de la Sécurité Sociale ne permet plus aux salariés de décider de leurs conditions de travail, comme le prévoient pourtant les dispositions du préambule de la Constitution de 1946, puisque c’est désormais le Gouvernement qui en gère tous les aspects.

Inconstitutionnalité de la réforme, illégitimité absolue de l’action gouvernementale, mais tout passe crème malgré les protestations populaires.

Et donc on en arrive désormais à cette réforme de 2023, qui n’est ni légitime (décidée par un organe non élu), ni démocratique (imposée aux Assemblées, puis vote bloqué non sur la Loi mais sur la confiance au Gouvernement, deux choses qui n’ont rien à voir), ni constitutionnelle (puisque viole toujours le préambule de la Constitution de 1946).

Le Conseil Constitutionnel est un organe non élu, donc les représentants sont désignés pour partie par le Président de la République, pour partie par les deux Présidents des assemblées, eux-mêmes élus par les membres desdites assemblées. Le Conseil Constitutionnel n’est donc ni démocratiquement élu, ni garant de la Souveraineté du Peuple français dont il n’émane absolument pas. Il ne se saisit que sur décision politique, et peut même décider de ne pas statuer. Dans les faits, et c’est déjà arrivé, il peut noter des inconstitutionnalités mais valider quand même un texte.

Quiconque prétend que notre système est démocratique, et que notre système politique respecte la Constitutionnalité, est un baltringue qui méritera le même sort que ces foutus enculés qui prétendent nous gouverner.

Et histoire de bien finir de casser le débat, je vais sortir le quasi Godwin: en juin 1940, Pétain est arrivé au Pouvoir en toute légalité, selon les procédures prévues par la Constitution de la IIIe République. De Gaulle, lui, était un fuyard qui a abandonné son poste, appelait à renverser le gouvernement en place et à mener des actions violentes et de sabotage, et était condamné à mort pour ça par le régime. Qui est resté dans l’Histoire comme l’archétype du traître, et qui est vu comme l’incarnation de la Souveraineté du Peuple français?

Parle-moi encore de légitimité, de constitutionnalité et de démocratie pour défendre la réforme des retraites, et ça va très mal se passer.

Sur les mandats d’arrêts de la CPI lancés contre la Russie…

Des enfants et leurs institutrices s’abritent dans le couloir de leur école maternelle contre un bombardement ukrainien en cours. L’image et sa légende viennent du site du Comité International de la Croix Rouge.

La Cour Pénale Internationale lance donc un mandat d’arrêt contre le Président Poutine et la commissaire aux droits des enfants Maria Lvova-Belova, sur le fondement d’éléments « traduisant une déportation forcée d’enfants depuis les territoires ukrainiens occupés jusque sur le territoire de la Fédération de Russie ».

Déjà, l’accusation est bancale: l’évacuation de populations civiles d’une zone en état de guerre n’a rien d’une « déportation forcée » en soi. La cour ne donne aucun détail, mais elle se baserait ici sur le fondement de l’article 7 de son statut, relatif aux « Crimes contre l’Humanité », et spécifiquement son 1.d « déportation ou transferts forcés de populations ». Le 2.d précise la notion: « Par « déportation ou transfert forcé de population », on entend le fait de déplacer de force des personnes, en les expulsant ou par d’autres moyens coercitifs, de la région où elles se trouvent légalement, sans motifs admis en droit international ».

Il semble assez clair ici que la Russie n’intervient pas auprès des enfants ukrainiens « par force » en les « expulsant » ou « par d’autres moyens coercitifs » (le mot « coercitifs » est extrêmement important, il traduit l’emploi d’une force militaire ou policière utilisant la menace ou la violence). Le motif « admis en droit international » est simplement l’aide humanitaire aux populations: des enfants, parfois orphelins, sont envoyés en Russie où ils reçoivent une assistance médicale, psychologique, et suivent des cours d’instruction.
L’objectif initial de cet article était de sanctionner les déplacements forcés de populations soit vers des camps (à l’image de ce qu’a fait Israel avec les Palestiniens), soit vers un pays tiers, comme par exemple l’expulsion des arméniens de la zone conquise par les azerbaïdjanais récemment au Haut-Karabagh.

Il y a donc ici un clair détournement de l’objectif initial qui a motivé la rédaction de cet article, qui pose question.

Le statut de la CPI impose à celle-ci de ne pouvoir se saisir que dans le cas d’un refus de l’Etat visé par des accusations de s’en saisir et d’instruire une procédure judiciaire. Dans le cas présent, il n’y a eu apparemment (de ce que je peux trouver) aucune plainte déposée en Russie, sur un quelconque fondement (par exemple « enlèvements »).
Elle peut également se saisir si le Conseil de Sécurité de l’ONU le lui demande en lui donnant compétence pour le faire, lorsque les faits sont tels qu’une procédure judiciaire normale serait inadaptée ou ne serait pas susceptible de venir en aide aux victimes présumées. Dans le cas présent, le CS ne s’est pas saisi d’un tel dossier: il n’y a même pas eu discussion/débat du « problème ».
Il semble donc extrêmement douteux que la Cour puisse lancer un tel mandat d’arrêt à l’encontre de deux personnalités russes, alors qu’elle n’en a pas la compétence.

Enfin, et le problème est de taille: l’Ukraine n’a jamais adhéré au statut de la CPI, même si elle lui a délégué une compétence très limitée dans le temps et l’espace pour les faits commis sur son territoire entre le 21 novembre 2013 et le 22 février 2014 (les événements de Maïdan), puis dans un second temps, pour les faits commis sur son territoire depuis le 20 février 2014. La déclaration vise expressément (mais pas limitativement) les actions russes dans le problème du conflit dans les région séparatistes du Donbass.
La Russie, quant à elle, a une situation bancale vis-à-vis du statut de la CPI. Le gouvernement l’a signé, mais comme aux Etats-Unis, c’est le Parlement qui valide cette signature. Or, la Douma ne l’a jamais fait, ce qui plaçait la Russie dans une situation étrange où elle n’est pas membre de jure stricto sensu, mais où sa volonté initiale a pu entrainer des conséquences juridiques (on considère qu’elle a manifesté son intention, même si elle ne s’est pas concrétisée). En 2013, le Président Poutine a écrit à la CPI pour lui confirmer l’intention de la Russie de ne PAS adhérer au statut, suite à la mise en cause tout à fait politique de son action militaire en Géorgie en août 2008. Le Statut prévoit en son article 127 qu’un Etat puisse se retirer de la CPI: la Russie a manifesté son intention de ne pas adhérer, ce qui ne constitue certes pas sur la forme un retrait pur et simple, mais en a clairement les conséquences juridiques. Les esprits chagrins qui expliqueraient que « oui mais du coup la Russie n’avait pas le droit de le faire parce que c’était pas la bonne démarche » n’auront qu’à consulter la Convention de Vienne de 1969 sur l’application des Traités, article 56, et constater que la Russie s’est effectivement retirée de facto et de jure de la CPI.
La Cour n’a donc pas de compétence sur ce fondement pour émettre un mandat d’arrêt à l’encontre d’un quelconque citoyen russe, à fortiori donc, contre Vladimir Poutine et contre Maria Lvova-Belova.

Il est intéressant de savoir que le procureur à l’origine de ces mandats d’arrêts est Karim Khan, qui, comme son nom l’indique, est… britannique. Il est particulièrement intéressant de savoir que c’est précisément lui qui, à son arrivée au poste de procureur en 2021, a écarté de tout examen préliminaire par la Cour les faits potentiellement répréhensibles commis par la coalition internationale en Afghanistan depuis l’invasion de 2001.

En conclusion, que ce soit en faits ou en Droit, la CPI n’a ni la compétence, ni la légitimité pour procéder à l’émission de ces mandats d’arrêts.
Elle est clairement motivée par des volontés politiques, ce qui est un reproche très récurrent et persistant qui lui est adressé, notamment par les pays africains, qui ont été les seuls pendant très longtemps à subir ses procédures, le plus souvent dirigées contre des chefs d’Etats et membres de gouvernement jugés « indolents » par les pays occidentaux comme la France ou le Royaume-Uni.

En résumé, une fois de plus, la CPI se déshonore en servant d’instrument politique totalement détourné des buts nobles qui étaient affichés comme les siens au moment de son institution en 2002. C’est un pas de plus vers la dissolution d’un ordre international construit depuis 1944 et participant à l’organisation des relations inter-étatiques, malheureusement trop souvent au seul profit de quelques Etats, au premier rang desquels les Etats-Unis et certains pays d’Europe.

Et pendant ce temps-là, les enfants des régions séparatistes du Donbass continuent d’être bombardés régulièrement par les forces ukrainiennes sans que ça n’émeuve personne.

Intéressante leçon de propagande ukrainienne

Capture d’écran de la vidéo sujet de cet article

Une vidéo est apparue sur le site ukrainien cenzor.net, montrant un soldat ukrainien fumer une cigarette et dire « slava ukraini » (« gloire à l’Ukraine ») avant d’être abattu par des rafales d’armes automatiques (des kalach’, pour faire simple). On entend à la toute fin le type qui filme insulter l’homme exécuté. La vidéo dure 12 secondes et ne montre absolument rien d’autre que ça. Personne n’est identifié. La partie ukrainienne n’a évidemment pas tardé à dénoncer un crime de guerre commis contre l’un de ses soldats.

Moins de 3 heures après la publication de la vidéo, une femme se présentant comme la soeur de la victime affirme l’avoir reconnu et l’identifie formellement, comme étant Timofii Shadura. Cet homme appartiendrait à la 30e brigade mécanisée (une unité d’infanterie disposant de transports blindés, pour faire simple), et aurait disparu le 3 février dernier, à Bakhmut/Artiomovsk, en combattant les « russes » (en réalité, c’est la PMC Wagner, et non l’armée russe).

Clairement, la vidéo montre un assassinat. Aucun doute là dessus, ce n’est pas une mise en scène. Seulement voilà, il est impossible de savoir qui a exécuté cet homme simplement en se basant sur la vidéo, qui est apparue sur la chaîne Telegram WarLife18+ (Voyna18), d’après le site cenzor qui donne directement le lien de la publication.

Or, il se trouve que cette chaîne publie exclusivement des vidéos et images issues… de la partie ukrainienne. Ce sont les soldats ukrainiens qui les envoient directement depuis le terrain à l’administrateur de WarLife18+ via un bot de contact. J’ai moi-même remonté pas mal sur le fil de publication de ce canal et je n’y ai trouvé que des vidéos ukrainiennes, aucune issue des russes ou de Wagner. Aucune affirmation « classique » selon laquelle la vidéo aurait été « découverte » sur le portable d’un « soldat russe » « abattu au front ». Aucune affirmation non plus selon laquelle la vidéo aurait été tournée par la partie russe ou Wagner. La légende dit simplement: « 18+ « Militaires » russes tirent à bout portant sur un prisonnier de guerre ukrainien non armé, ses derniers mots ont été « Gloire à l’Ukraine ». Warlife18+ ».

Si vous êtes habitué à la communication, vous comprenez immédiatement qu’il y a anguille sous roche.

Si vous suivez le conflit russo-ukrainien depuis un an, vous savez que les soldats ukrainiens qui cherchent à se replier du front, sans avoir obtenu expressément l’ordre de le faire de la part de Zelenski et du haut commandement militaire, se font tirer dessus par les membres des formations extrémistes d’Azov et Aidar (principalement, mais il y a aussi des unités plus « confidentielles » issues de formations plus politiques que militaires, comme Pravy Sektor, qui agissent comme « commissaires politiques » dans les lignes arrières*).

Ma conclusion, et je peux vous garantir que j’en suis sûr à 100%, c’est que cette vidéo montre un soldat ukrainien être exécuté pour « désertion » et « lâcheté » par des membres d’une unité ukrainienne, probablement issus de l’une ou l’autre de ces unités extrémistes qui traquent les soldats qui essaient de se replier ou qui ne montrent pas suffisamment de « zèle guerrier ». Les derniers mots de la victime, « slava ukraini », montrent simplement que ce n’était pas un déserteur et qu’il s’est battu jusqu’au bout pour son pays, ou du moins ce qu’il croyait être son pays.

* Il se trouve que justement Wagner a annoncé la mort de l’un des « officiers » de Pravy Sektor à Bakhmut/Artiomovsk, rattaché à la 67e brigade de fusilliers spécialisés. L’homme, Dmitry Kotsyubailo (indicatif « Da Vinci »), était connu depuis 2014 en raison de ses exactions dans le Donbass contre les populations civiles. C’est également lui qui avait fait l’odieuse « blague » (parce qu’il l’a dit en rigolant, pas parce que c’en est une) dans une interview au New York Times selon laquelle il avait nourri un loup avec les os d’enfants russophones. Zelenski lui avait remis la médaille et le titre de « héros de l’Ukraine » en 2021…

Pour les élites, la guerre est un jeu

Un banal post Linkedin est l’occasion pour moi de vous expliquer un peu pourquoi il y a la guerre en Ukraine plutôt que la paix.

Le post ci-contre est issu de l’Atlantic Council, un think tank dont l’activité est de promouvoir les activités de l’OTAN auprès des politiques et, indirectement, du grand public.

Dans ce message (consultable sur le site de l’Atlantic Council), typique de la pensée stratégique occidentale, l’organisation fustige les avocats d’une paix immédiate en Ukraine, ou au moins d’une action pour figer le conflit dans son état actuel. C’est la solution classique qui s’offre aux diplomates, pour tenter de résoudre par la suite la crise par la voie diplomatique. On l’a vue, par exemple, s’appliquer à propos du Haut-Karabagh, en Arménie/Azerbaïdjan, pas plus tard que l’année dernière. Le but de ce genre de paix est de protéger les populations civiles et les infrastructures, la guerre n’épargnant ni les unes, ni les autres.

L’Atlantic Council considère qu’en Ukraine, une telle paix reviendrait à reconnaître les « gains territoriaux » de la Russie, à savoir la Crimée (annexée en 2014), la République Populaire de Donetsk, la République Populaire de Lougansk, l’Oblast de Kherson et l’Oblast de Zaporijjie. Ce n’est absolument pas le cas: une paix immédiate (ou en tout cas un armistice, c’est à dire la cessation des hostilités) aurait pour effet de figer le front, mais n’aurait aucunement pour effet juridique de reconnaître quelque concession de territoire que ce soit.

La logique de l’Atlantic Council (et de toute la pensée militaire occidentale, en général) est qu’il faut d’abord « reconquérir » par les armes ces territoires avant de commencer une quelconque négociation de paix. Il s’agit d’obtenir un ascendant stratégique sur l’adversaire pour le forcer à accepter plus de concessions lors d’éventuelles négociations de paix.

Ceci, mesdames et messieurs, est le résultat de 50 années d’enseignement de la « Théorie des jeux » dans les écoles de pensée stratégique. La théorie des jeux est une série de principes selon lesquels on cherche à maximiser des gains tout en minimisant la mise de départ et/ou les pertes. Basée essentiellement sur des calculs statistiques, cette théorie est issue de la recherche en économie, où elle a fait sa première apparition sous la plume de John von Neumann et d’Oskar Morgenstern, en 1944. C’est surtout John Nash qui en sera le plus fervent constructeur, et qui permettra à ces principes dits « ludiques » (d’où le nom « théorie des jeux ») de s’appliquer dans des domaines aussi variés que la sociologie, la psychologie, et bien sûr, la stratégie militaire.

Le développement de cette pensée amène le militaire à envisager la guerre comme un « jeu », où il faut maximiser les « gains » (territoriaux, économiques, politiques…) tout en minimisant les pertes (territoriales, troupes, équipements…). Elle entraine, dans la pensée des généraux, l’idée que pour que les armes se taisent, il faut avoir obtenu quelque chose dont la valeur surpasse les coûts dépensés pour l’acquérir.

Les pays de l’OTAN ont dépensé en 1 an plus de 240 milliards de dollars dans ce conflit, chiffre qui ne fait qu’augmenter chaque jour ou presque, avec toujours plus d’annonces de livraisons de matériels, de munitions, et d’aides financières (qui ne sont que des prêts à fort intérêts, mais passons…). Ce chiffre vertigineux donne une idée de ce qu’il faudrait que l’OTAN obtienne pour accepter de ne serait-ce que figer la guerre en Ukraine, dont le gouvernement n’a plus son mot à dire, et qui de toute façon ne dirait probablement rien puisqu’il profite des sommes astronomiques englouties dans le pays pour s’enrichir de façon exponentielle via la corruption et divers trafics très rentables en temps de guerre…

L’étendue des pertes occidentales en Ukraine, dans cette perspective, s’apparente à celles d’un joueur compulsif dans un casino, qui s’endette de plus en plus en espérant se refaire grâce à un coup de chance.

La guerre n’est pas un jeu, elle a causé la mort de centaines de milliers de personnes depuis un an, et a déplacé plus de 13 millions d’ukrainiens. Nos gouvernants et leurs états-majors sont coupables directement de la ruine de l’Ukraine et de l’Europe.

Personne n’en parle, mais l’Afrique du Sud est au bord du gouffre.

La « Nation arc-en-ciel » est, pour ceux qui suivent ce pays, un véritable cauchemar, et ce depuis maintenant une vingtaine d’années, et ça empire tous les ans.

A titre d’exemple, en moyenne sur les 3 derniers mois de 2022, 83 personnes ont été victimes de meurtres et assassinats, chaque jour. Le pays a également l’un des plus forts taux de viol au monde, avec plus de 150 victimes recensées pour 100 000 habitants (en 2020, 700 naissances suites à un viol l’ont été par des jeunes filles de 9 et 10 ans). On est sur des taux comparables à ceux de pays gangrenés par les cartels et les gangs en Amérique Latine.

Mais une société ne s’effondre pas seulement à cause de sa violence interne, elle s’effondre aussi parce que les politiques sont incapables de gérer le pays. L’Afrique du Sud est l’un des pays les plus corrompus du monde, et cela a forcément des conséquences sur la gestion des affaires du pays. La chose s’explique en partie parce que l’Afrique du Sud est un pays très riche en minerais et pierres précieuses, et que tout le monde arrose tout le monde pour « faciliter » les exploitations et exportations. Outre le fait que cela crée une situation où l’extrême pauvreté côtoie l’extrême richesse, cela a aussi un coût social énorme pour les sud africains qui se retrouvent privés des revenus de l’exploitation de leurs richesses minières. Les grèves et émeutes y sont monnaie courante, et sont bien plus violentes que ce qu’on connaît en Europe.

Surtout, c’est désormais toute la chaîne des services de base qui s’effondre: alimentation (les meurtres de fermiers blancs en sont une des causes), transport (il y a régulièrement des chasses à l’homme organisée pour tuer les conducteurs de camion étrangers, accusés de « voler le travail des locaux »), santé (il n’y a pas de couverture universelle, et le système combine organismes privés très efficients pour les riches, et organismes publics dysfonctionnels pour le reste), et bien sûr énergie.

L’énergie est précisément ce qui est en train de précipiter le pays dans le chaos, petit à petit. Depuis 2007, le réseau électrique sud africain n’en finit plus de s’effondrer, et le gouvernement a dû imposer des coupures roulantes, comme nous aurions pu avoir cet hiver. Là où ça ne devait être que temporaire et durer pas plus qu’une heure par jour, le gouvernement vient d’instaurer le « stage 7 » de ce plan, qui permet de couper le courant pendant plusieurs heures, et ce 3 fois par jour. Le gouvernement envisage déjà la mise en place du « stage 8 », pour atteindre jusqu’à 14h de coupure quotidienne au total. Pire: alors qu’il y a 54 Gigawatts de capacité de production installée, 23 GW sont désormais hors ligne, dont seulement 4.5 pour raisons de maintenance. C’est qu’en fait, c’est le réseau qui ne tient plus, en raison d’un manque de maintenance aggravé par le pillage de l’électricité par des branchements illégaux.

Environ 80% de l’énergie électrique sud africaine est produite par des centrales à charbon, seuls 5% le sont par deux centrales nucléaires, qui sont en mauvais état. Et il n’y a aucune solution pour eux, parce qu’ils subissent une pression internationale, notamment financière, pour… respecter les normes environnementales et mettre en place la transition énergétique vers le renouvelable.

L’Afrique du sud est un paradoxe, car c’est un pays extrêmement riche en ressources, et qui est pourtant en train de basculer dans le tiers-monde. Ce pays est au bord de devenir un pays failli, et il n’y a malheureusement aucune solution dans le cadre de l’Etat de Droit et du Constitutionnalisme occidental. Si ce pays continue sur cette pente, il va devenir un Zimbabwe au centuple d’ici quelques années. Les mots « guerre civile » ne sont plus tabou et ne sont plus une caricature pour décrire ce qui est en train de s’y passer.

L’exemple sud-africain constitue un avertissement clair et sévère pour tous les apprentis sorciers qui gèrent actuellement l’Europe en y provoquant crise sur crise dans l’espoir vain de contrôler les populations.

Pour aller plus loin (article en anglais) : https://www.news.com.au/finance/economy/world-economy/stockpile-food-and-water-south-africa-faces-civil-war-conditions-if-power-grid-collapses/news-story/231d976d93e9a34ef8dfaf0ac3db6582

A propos de Bakhmut/Artiomovsk et de la propagande occidentale

Un milicien de la PMC « Wagner », à Bakhmut/Artiomovsk

Après le diner, il m’arrive de zapouiller sur la téloche pendant que l’eau du thé chauffe, et je ne suis généralement pas déçu d’avoir décidé de ne plus la regarder depuis maintenant plus de 15 ans.

Ce soir, je suis tombé sur les mines déconfites et graves des propagandistes de LCI. Il faut dire, Bakhmut/Artiomovsk est en train d’être « évacuée » par les forces ukrainiennes, qui ne peuvent pas tenir leurs lignes face aux forces de Wagner. Rien de surprenant pour quiconque suit ce conflit depuis un an (voire plus): l’armée ukrainienne, malgré l’indéniable bravoure des soldats sur le terrain, n’a plus la même qualité qu’il y a un an, parce que les pertes de soldats entrainés ont été remplacées par des conscrits peu et mal entrainés. En face, la PMC Wagner dispose d’équipements, de munitions (malgré l’épisode de « crise » de la semaine dernière), et surtout d’hommes endurcis et aguerris.

Bakhmut/Artiomovsk n’a pas d’importance stratégique particulière aux yeux du gouvernement ukrainien. Si c’était le cas, on aurait vu le déploiement de troupes considérées comme « d’élite », à savoir Azov et les mercenaires étrangers de la « Légion Etrangère Ukrainienne », et les combats de la périphérie de la ville auraient été autrement plus violents. Et force est de constater que si les combats ont été durs, ils n’ont pas été particulièrement violents, comme on avait pu le voir à Marioupol (les combats avaient alors opposé Azov et quelques régiments ukrainiens aux troupes tchétchènes, principalement).

La tronche des propagandistes, ce soir, valait le coup. Voilà des mois qu’ils expliquent que les russes attaquent par vagues suicidaires, qu’ils sont obligés de recruter dans les prisons pour remplacer leurs pertes effroyables, qu’ils n’ont aucun équipement et qu’ils volent les équipements électroménagers des civils pour réparer leurs équipements lourds. Toutes ces conneries, tout ce monceaux infâmes de déclarations idiotes et stupides, volent en éclat: la « minable petite milice du cuisinier de Poutine » est en train de conquérir seule ce que notre propagande nous présentait comme un bastion stratégique ukrainien.

La propagande est importante en temps de guerre, pour soutenir le moral de la population. Si celle-ci ne soutenait pas l’effort de guerre (ou en tout cas, si elle ne s’y oppose pas), il n’y aurait pas d’implication occidentale massive comme on voit en Ukraine. Tant que les médias présentent des nouvelles positives (comme la « reconquête » du nord de l’Ukraine, suite à l’évacuation sans combat des forces russes fin mars 2022, ou la « reconquête » de la zone au nord de la Dniepr dans la région de Zaporojie suite à l’évacuation des troupes russes, la aussi sans combat…), tant qu’on nous fait croire que l’Ukraine gagne sur le terrain, tout va bien. Quand en plus on nous fait croire que des « armes miracles » comme les Leopard 2 ou les M1 Abrams arrivent sur place, comment ne pas croire en la victoire prochaine de l’Ukraine?

Sauf que tout ça, ça s’apparente énormément à la propagande de la fin du régime hitlérien, avec ses Wunderwaffen (« armes miracles ») promises par le régime et qui ne sont jamais arrivées. Or, si on pourrait comprendre parfaitement le fait si elle provenait du gouvernement ukrainien lui-même, là on comprend mal l’affaire parce que justement, tout provient des services médiatiques occidentaux, qui ne sont toujours pas (officiellement) partie au conflit.

Nos gouvernants savent que ce conflit, qui n’aurait jamais été déclenché si ils n’avaient pas poussé Zelenski à se croire tout puissant, est dans une impasse totale. La guerre ne dure que parce que les russes retiennent leurs forces, pour ne pas se retrouver piégés dans un pays dont ils ne veulent pas (ce qu’ils voulaient, c’était un Etat tampon démilitarisé, dont l’économie aurait été tournée vers la Russie, mais avec des partenariats vers l’Occident… une vision certes impérialiste, mais calquée sur Cuba).

Les russes comme les occidentaux se dirigent vers un « pat » en Ukraine, parce que personne ne peut véritablement gagner: militairement, les russes peuvent écraser l’Ukraine, mais ils perdront politiquement, alors que les occidentaux sont en train de sacrifier l’économie européenne pour rechercher une victoire militaire impossible.

Personne n’a pensé à demander leur avis aux ukrainiens eux-mêmes, depuis le coup d’état de 2014. Du moins, personne ne l’a voulu, parce que la réponse aurait déplu: les Ukrainiens veulent (voulaient) être indépendants, et être un pont entre l’Europe et la Russie, profitant des deux « mondes » en les rapprochant.

Le coup d’état de 2014, orchestré par les services de renseignement britanniques et américains, a détruit ces belles illusions. Avec, pour résultat aujourd’hui, 8 millions de réfugiés ukrainiens à l’étranger, 5 millions de déplacés à l’intérieur de l’Ukraine, 250 000 morts, et un pays qui n’a plus aucun avenir politique ni économique.

C’est à tous ces gens que je pense quand je vois la mine déconfite des propagandistes qui font tout pour « vendre » la guerre aux masses occidentales, comme si c’était un jeu. Et, vraiment, j’espère qu’ils paieront pour tous ces mensonges et tous ces malheurs auxquels ils contribuent inlassablement, année après année.

Ukraine: un an de guerre

Cette image est datée du 24 février 2022, à 4h03. Elle est la première trace enregistrée du conflit opposant la Russie au bloc OTAN/Ukraine, et montre un soldat ukrainien du poste frontière « Kalanchak », dans la région de Kherson (juste au nord de la Crimée), qui vient de repérer un convoi militaire russe foncer vers la frontière.

Ce matin là, comme beaucoup, je me suis réveillé un peu assommé par la nouvelle et l’inquiétude. Quelques semaines plus tôt, j’écrivais que la Russie n’envahirait pas l’Ukraine, qui menait comme chaque année son cirque pour obtenir du gaz de la part de la Russie et de l’argent de la part des occidentaux, profitant des exercices militaires annuels conjoints entre la Russie et la Biélorussie pour faire croire à une invasion prochaine. J’étais convaincu qu’il n’y aurait pas de conflit armé, parce que ce n’était dans l’intérêt (économique) de personne. Les choses se sont infléchies au cours du mois de février, et surtout lors de la Conférence sur la Sécurité de Munich, à laquelle, pour la première fois, la Russie ne participait pas. Lorsque le 19 février 2022, dans son discours, Zelensky a annoncé son intention de renoncer au Memorandum de Budapest, par lequel l’Ukraine s’était engagée à renoncer à l’arme nucléaire à la suite de l’effondrement de l’URSS, j’ai compris que ça ne passerait pas pour les russes. Je pensais aussi que ça ne passerait pas vraiment pour les occidentaux, mais personne n’a moufté. Une Ukraine dotée de l’arme nucléaire, avec une partie de son gouvernement imposant des mesures anti-russes (et anti-roumains, anti-polonais et anti-hongrois), clamant régulièrement sa haine des russes et des populations refusant la situation politique issue du coup d’Etat de Maïdan en 2014, était clairement une ligne rouge absolue pour la Russie. Le conflit militaire était inévitable, mais je n’envisageais pas qu’il puisse survenir moins d’une semaine après.

La suite, vous la connaissez. Une Ukraine prise dans une tenaille stratégique comme on n’en avait plus vue depuis la seconde guerre mondiale, mais pourtant figée pendant de longues semaines sans explication. Les autorités militaires et le gouvernement russe avaient simplement fait un pari mal calculé: ils pensaient que l’armée ukrainienne en profiterait pour mener son propre coup d’Etat et renverser Zelensky. C’était très mal calculé, puisque l’armée avait été purgée de tous ses éléments jugés pro-russes après l’annexion de la Crimée en 2014. Le coup d’Etat ne venant pas, c’est finalement le retrait de toutes les troupes au nord de l’Ukraine, entre le 30 et le 31 mars 2022. L’offensive a repris au sud, dans l’objectif de libérer les deux républiques du Donbass, en maintenant la pression militaire sur la région de Karkhov. Puis, sans explication ni réel impératif stratégique, les troupes russes évacuent totalement la région de Karkhov à la suite d’une percée modeste menée par des mercenaires étrangers et deux régiments ukrainiens, début septembre, quelques jours avant les très controversés referendums dans les 4 provinces ukrainiennes occupées, qui « décideront » de leur rattachement à la Russie (à l’époque, je vous avais exposé pourquoi ces referendums n’étaient pas souhaitables ni valables juridiquement parlant).

Et depuis, plus rien. On nous annonce des opérations militaires d’envergure des deux côtés de la ligne de front, qui n’arrivent jamais. Si la PMC Wagner grignote du territoire ukrainien régulièrement, elle est bien la seule faction militaire à réellement combattre du côté russe. Côté ukrainien, la mobilisation n’en finit plus de rabaisser ses standards (des jeunes de 16 ans peuvent servir dans l’armée à des positions non combattantes, des jeunes de 17 ans peuvent intégrer des unités combattantes si le calendrier de déploiement de celles-ci fait qu’ils auront 18 ans au moment d’aller sur le front), voire recourt à la mobilisation forcée d’hommes en pleine rue. Et toujours, cette boucherie qui n’en finit plus dans les tranchées ukrainiennes, où les soldats ukrainiens subissent tous les jours des bombardements d’artillerie intenses et meurtriers.

Nos gouvernements promettent cyniquement des équipements pour une Ukraine qui n’a de toute façon pas les moyens humains de les employer, ni les moyens matériels de les entretenir. « Il ne faut pas que la Russie gagne ». Gagner quoi? Des territoires? Ils étaient pro-russes avant même que n’éclate le coup d’Etat en 2014. Des avantages économiques? Là dessus, l’Europe est exsangue et démolie alors que la Russie dispose de tout ce qu’il lui faut pour ne pas devenir un autre Iran ou une autre Corée du Nord. Et elle étend son influence en Afrique au détriment d’une Europe qui n’a cessé d’y piétiner les peuples sous le mépris, en y entretenant des réseaux de pouvoirs corrompus et à la solde de l’Occident.

Il n’y a rien à gagner pour la Russie, à part laisser l’Europe continuer de s’embourber dans ses contradictions et ses crises politico-économiques jusqu’à ce qu’elle implose comme l’URSS. Nous n’en sommes pas loin: l’euro menace de se dévaluer très fortement par rapport aux autres monnaies, la balance commerciale est catastrophique, le secteur bancaire n’en finit plus de sortir de la crise et est en train de plonger dans une catastrophe totale parce que rien n’a changé depuis 2007, l’énergie est une catastrophe en devenir qui va éclater l’hiver prochain, le secteur agricole va sérieusement souffrir à partir de cette année du fait des manques d’eau (sécheresses s’aggravant d’année en année, parce qu’on est dans ce cycle climatique actuellement), mais aussi du fait de l’embargo sur les engrais russes. Pendant ce temps-là, la Russie a déjà réaligné ses propres exportations vers l’Asie et devrait renouer avec la croissance dès ce trimestre, après une année 2022 en demi-teinte suite à l’embargo sur les produits pétroliers et gaziers décrété par certains pays européens.

Alors jusqu’à quand allons-nous jouer ce jeu stupide, et jusqu’à quand allons-nous laisser les civils ukrainiens être massacrés parce que leur propre gouvernement corrompu les envoie à l’abattoir?

Les mouvements occidentaux sur le grand échiquier mondial, visant à encercler et isoler la Russie, ont clairement échoué en Ukraine, et c’est désormais l’Europe qui se voit menacée de l’intérieur. N’importe qui de sensé aurait arrêté les frais immédiatement après le retrait russe du nord de l’Ukraine fin mars 2022, et aurait tenté une véritable approche diplomatique pour au moins figer le conflit.

A moins que le vrai enjeu de ce conflit-là ne soit pas l’Ukraine, mais bien l’avenir de l’Europe. Pas l’UE, déjà condamnée à moyen terme, comme le montrent ses dirigeants plus occupés à taper dans la caisse pour prévoir leur retraite dorée en Amérique. L’Europe.

C’est aujourd’hui que se décide notre avenir, en tant que civilisation. Nous sommes assiégés partout, et l’ennemi est déjà dans nos murs. Poutine a raison lorsqu’il parle de valeurs occidentales « sataniques »: ce qui se passe chez nous depuis vingt ans est la négation totale de la nature humaine et de ses valeurs.

Les Lumières se sont transformées en un culte de la Mort (avortement, avortement tardif, suicide assisté, euthanasie…), de la Débauche (apologie de la sexualité omniprésente, défense de plus en plus ouverte des paraphilies que sont la zoophilie et la pédophilie, célébration grandiloquente de la perversité dans tous les pans de la « culture »…), de la drogue (cannabis, cocaïne, MDMA, méthamphétamines, mais aussi médicaments, vaccins et autres produits expérimentaux testés à grande échelle sur des populations non informées voire désinformées…), et de tout de qui détruit à petits feux ce qui constitue cette « âme » qui a fait de nos civilisations européennes ce que l’Humanité avait de plus beau et de plus grandiose.

Refusons de sombrer. Ça commence dans nos vies de tous les jours. Ça commence par de petits gestes au quotidien, comme couper la boite à propagande par la peur, par le refus de participer à cette société qui fonce vers le gouffre en chantant, et par la recherche de l’autonomie de vie et de conscience. Ça commence par la nécessité de reconnecter son âme avec la beauté des petites choses, et des grandes choses. Redécouvrir la beauté du Sacré, au sens large, pas uniquement religieux.

L’Humanité n’est pas un virus. Vous n’êtes pas un virus qui rend la planète malade. Et vous n’êtes pas impuissants face à la marche du monde: vous décidez pour vos propres vies, et vous bâtissez l’avenir de vos enfants. Soyez intransigeants avec vos valeurs, et tant pis si ça choque ceux qui font semblant de se conformer à ce qu’ils croient être la norme. Là où quelqu’un tient debout, les autres finissent par se relever.

Les chars en Ukraine: une belle blague qui va surtout profiter aux intermédiaires.

Les USA ont tout fait pour amener l’Allemagne à accepter la livraison de chars Leopard 2 polonais à l’Ukraine. Ces chars sont des Leopard 2A4, livrés au début des années 2000, il ne s’agit pas de la version modernisée au standard Leopard 2PL.

Le Leopard 2 est un char de combat principal (Main Battle Tank, MBT) développé en Allemagne dans les années 1970, sur les ruines encore brûlantes d’un projet de char conjoint entre l’Allemagne de l’Ouest et la France (déjà…). La version A4 est donc la 4e mise à niveau de ce char déjà ancien, équivalent des chars T-72 soviétiques, et a été introduite en… 1985. Ces chars livrés en Ukraine ne seront pas mis à niveau.

Autant dire que c’est un char totalement dépassé face aux T-72B3 et B3M (mises à niveau de 2010 et 2016) qui équipent actuellement massivement l’armée russe. Je ne parle même pas des chars T-80BVM (2017) et T-90M, ni du T-14 Armata.

Le Leopard 2A4 est « célèbre » pour avoir été le premier char occidental a être détruit par des armements d’origine soviétique en Syrie: les jihadistes du Califat en ont détruit ou endommagé 3 sous bannière turque. Ils en ont aussi capturé 2 autres. Les turcs ne sont pas spécialement plus cons que les ukrainiens, donc on peut s’attendre à quelques scènes du même genre du côté de Donetsk…

Côté anglais, avec les chars Challenger, ce n’est guère plus brillant. Si sur le papier le char est plus récent (1994), ce n’est qu’un recyclage du Challenger 1 avec une nouvelle tourelle. Il n’a jamais été modernisé depuis son entrée en service actif, et sa disponibilité au sein des forces armées anglaises n’est pas glorieuse: c’est une machine complexe qui requiert de l’entretien régulier, du fait de ses 66 tonnes qui pèsent littéralement très lourd sur sa suspension et son arbre de transmission. Le même problème touche le Leopard 2A4, qui pèse à peu près autant.

En fait, sur les quelques 500 chars entrés en service en 1994, seuls 56 sont actuellement en service actif effectif outre-manche…

Côté américain enfin, là je crois qu’on a la palme. S’ils vont livrer 31 Abrams pour 400 millions de dollars (alors qu’ils sont, avec prix ajusté sur l’inflation, à 9 millions pièce… ben oui, c’est pas gratuit, « l’aide américaine »), il s’agira de la version M1A1, c’est à dire celle de 1985 (pour une conception de 1975). C’est, en gros, la version qui a servi pendant la Guerre du Golfe de 1991. Il est plus léger que les deux précédents, donc sensément moins exposé au problème d’embourbage dans la célèbre raspoutitsa ukrainienne (la boue lourde et collante qui a engloutit tant et tant de soldats allemands pendant la seconde guerre mondiale), mais son moteur est trop faiblard par rapport à son poids, et surtout ce char n’est absolument pas fait pour combattre en milieu froid. En gros, il ne sera « utile » qu’en été, vu qu’il sera neutralisé par la boue en automne et au printemps, et par le froid en hiver. Wa.Ouh.

Mais tout le monde n’est pas perdant. Si il y a autant d’insistance à liquider les stocks d’armements européens dans ce gouffre qu’est devenue l’Ukraine, c’est parce que chacun y trouve son compte sur le plan financier. Le gouvernement ukrainien, déjà, qui perçoit son écot sur chaque livraison. Zelenski vient justement d’éliminer 9 membres du gouvernement qui étaient devenus trop gourmands, pour « corruption ». Détail hilarant quand on sait que sa fortune estimée a été multipliée par 100 depuis un an, pour s’établir à plus de 3 milliards de dollars, majoritairement détenus dans les paradis fiscaux (son nom est partout dans les Pandora Papers…).

Les envoyeurs ne sont pas en reste, puisque l’argent perçu revient en partie à l’envoyeur sous forme de rétrocommission. C’est notamment ce mécanisme qui est à l’origine de l’attentat contre un bus d’ingénieurs français à Karachi au Pakistan en 2002 (14 morts): des rétrocommissions avaient tardé à être payées à des responsables pakistanais (elles avaient servi à payer la campagne électorale de Balladur en 1995, comme il a perdu il n’a jamais pu rembourser comme promis).

On se souvient du président Sarkozy qui était si volontaire pour exporter les armements français, on se souvient encore plus de Hollande qui a été le meilleur VRP pour Dassaut que l’Histoire ait connu: tous les deux ont encaissé énormément d’argent sur des comptes offshore en rétrocommissions; Macron encaisse tout autant depuis 2017, il n’y a pas de raison.

Et tout ce petit monde est connecté par des intermédiaires, présentés comme des « hommes d’affaires », à l’image de Ziad Takieddine dont le nom ressort dans tous les scandales politico-financiers des années 1990-2000, remplacé dans la macronie par Alexandre Benalla, reconverti dans les « affaires internationales » depuis fin 2018…

Il y a des milliards en jeu, et la guerre en Ukraine, ils s’en foutent, en réalité. Ce qui les intéresse, c’est les transactions qu’elle permet. Tant que ça durera, tant qu’il y aura des ukrainiens à envoyer se faire massacrer sous l’artillerie russe, tout ce bordel continuera. Personne n’en a rien a branler de l’Ukraine: ce qu’ils veulent, c’est les billets que leur petit business leur rapporte en quantités astronomiques.

C’est pour ça, il n’y a aucune illusion à se faire: il y aura des Leclercs en Ukraine, et pourquoi pas, des Rafales (les avions de combat, c’est la prochaine étape)…

Les prémices de la conquête spatiale et l’arme nucléaire…

Le premier objet créé par l’Homme à avoir atteint l’espace n’est pas Sputnik, et l’objet fabriqué par l’Homme le plus rapide n’est pas Voyager, mais… une plaque d’égout.

En 1957, une série d’essais atomiques souterrains baptisée Operation Plumbbob a lieu au Nevada. La série d’essais consiste à creuser un tunnel vertical dans le sol, long de plusieurs dizaines de mètres, et d’y déposer une bombe atomique pour en mesurer les effets. Evidemment, on ferme le trou avec un bouchon en bas de l’excavation, juste au dessus de la bombe, et on ferme en surface avec une plaque similaire à celle de nos plaques d’égouts (pour éviter de tomber dedans, pas pour « retenir » l’explosion). L’objectif est surtout d’essayer de limiter les retombées nucléaires dans l’environnement. La plaque en acier, que je vais baptiser AstroBoy, est épaisse de 10 cm et large d’environ 1 mètre, pesant plusieurs centaines de kilos et se trouve 150 mètres au dessus.

En bas du tunnel vertical, se trouve Pascal-B, une bombe atomique d’une puissance de 0.3 kilotonnes de TNT, avec juste au dessus, un « bouchon » en béton contenant des appareils de mesure, qui sont évidemment sacrifiés dans l’expérience.

Les responsables savent très bien ce qui va se passer, mais la question est de savoir dans quelle proportion. Ils font donc placer des caméras à prise de vue rapide pour surveiller le haut du trou, où se trouve Astroboy. Puis vient le moment de la détonation.

Le 27 août 1957, à 22h35 GMT, AstroBoy est soufflée dans les airs. La caméra à prise de vue rapide, malgré sa vitesse, n’enregistre la plaque que sur une seule image. D’après les estimations et les calculs du responsable de l’essai, Robert Brownlee, la vitesse atteinte par AstroBoy est de l’ordre de 6 fois la vitesse de libération, qui est de 11,5 kilomètres par seconde environ. C’est à dire qu’elle s’est envolée à la vitesse de 65~70km/s.

Ce qui représente une vitesse de… 234 000km/h. (Voyager 1 va à 61 500 km/h)

Beaucoup de rabat-joie estiment que AstroBoy n’aurait pas pu résister la traversée des couches denses de l’atmosphère, qui sont situées entre le sol et une trentaine de kilomètres d’altitude, en expliquant que les objets hypersoniques se désagrègent à cause des frottements de l’air. Mais ils oublient de préciser que AstroBoy n’y a été soumise que moins d’une demi seconde, une durée de temps largement insuffisante pour observer la désagrégation hypersonique sur un objet de cette masse.

Selon toute vraisemblance, AstroBoy a donc rejoint les étoiles à la vitesse intersidérale de 234 000km/h.

YEET.